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Monde.

Monde


 Je veux changer le monde. Quoi qu'est-ce qu'y a...? Qu'est-ce que j'ai dit... Oui, je veux changer le monde. Vous n'y croyez pas une seule seconde ...? Ce n'est tout de même pas bien compliqué de changer le monde : il suffit de le faire à mon idée, et pas à celle des autres. La preuve : les idées des autres ne marchent pas.
Le monde va mal. Pour moi tout va bien, mais il y a des gens pour qui tout va mal. Les sans-boulot, les endettés, les affamés, les assoiffés, les spoliés, les exploités, les laissés pour compte, la liste serait longue et si je la voulais exhaustive il ne me resterait guère de temps pour changer le monde. A chaque jour suffit sa tâche – sa tache aussi d'ailleurs - et je suis bien obligé de me borner à réfléchir au cas par cas, c'est à dire à ce dont tout le monde parle, au moment où on en parle. En somme, courir au plus urgent. Demain par exemple je me consacre au cas des étudiants et à la recherche. Car bien entendu j'ai des solutions, il suffit de me soumettre le problème.
Comme je le disais plus haut, il suffira de faire les choses à mon idée. Car ce qui ne va pas à mon idée est inintéressant sinon je le dirais. Et le redirais. Autant dire que j'ai beaucoup à dire. Sur bien des choses si ce n'est sur à peu près tout. Je compte apporter au règlement des problèmes du monde mon savoir-penser d'exception. Ne me remerciez pas, j'aime mon prochain. Vous penserez seulement à moi au moment d'élire un Président du Monde Changé. Dont j'intitulerai le préambule de constitution : Préambule à la Constitution d'un Monde Nouveau . PCMN. Non...? Cà va pas... ? Hé bien faites-moi des propositions. C'est cela, la démocratie. Mais enfin PCMN me paraît bien.
Alors le monde d'Avistodenas – il ne saurait de toute façon y en avoir de plus cohérent ni de meilleur – sera juste, équitable pour tous, grâce au dévouement de mes ministres, qui forcément seront mes amis. Il n'est guère possible de former un gouvernement avec des ennemis et des raclures qui n'auront de cesse de me l'avoir saboté ! Mais si je veux changer le monde, me dit-on, ici et là, je vais rencontrer des oppositions. Evidemment ! L'opposition, c'est fait pour ça ! L'opposition de ceux qui, soit ne veulent pas que le monde change, soit qui veulent le changer « à leur idée », pas à la mienne. Mais comme la mienne est nécessairement la bonne, l'unique ! Justement parce que c'est la mienne... Que peut-on répondre à cela ! Que ma façon n'est pas la bonne ? Alors... alors là, c'est un argument de jaloux, voilà, c'est bien la preuve que j'ai raison.
Et croyez-moi, je ne cherche pas à vous bourrer le mou, vous voyez bien que je ne fais pas de belles phrases aussi inutiles que bien léchées. Je veux changer le monde, point. Ne commençons pas avec les aubes radieuses, les lendemains qui chantent et les grands soirs de violonistes : on vous a déjà fait le coup vingt fois et cela n'a rien donné, le monde est toujours aussi pourri. C'est pas une preuve, ça ? Des preuves, j'en ai plein ma besace.
C'est la raison pour laquelle je dois me consacrer au monde, et le fait que l'on ne m'ait rien demandé n'est pas un motif suffisant pour me soustraire à mes responsabilités. Avant d'en venir aux solutions, je me dois de fournir un préambule à l'ensemble de mon programme, afin de bien clarifier les idées, de lever le moindre doute sur mes capacités intellectuelles.
Car je suis responsable. Enfin non. Je ne suis pas responsable de ce que le monde aille mal. Je suis juste responsable de le faire aller bien. Et pour le faire aller bien, il faut qu'il aille à mon idée. Forcément. Je ne conçois pas un monde allant bien qui aille à l'encontre de mes idées : c'est ainsi qu'alors le monde irait encore plus mal, pour le coup. Un monde aussi injuste que le nôtre n'a aucun avenir. On ne peut pas laisser se multiplier de telles injustices : les sans-boulot, les endettés, les affamés, les assoiffés, les spoliés, les exploités, les laissés pour compte... Je l'ai déjà dit ...? Ah oui pardon ! Ah que j'aime à répéter ce bréviaire, qui entretient ma flamme et là, je ne parle même pas des OGM, du changement climatique, des économies d'énergie, de la nourriture bio, vous pensez...! Si j'ai des solutions ! C'est bien simple : je pense un problème, la solution m'apparaît , nimbée d'un halo de vérité. Elle me tombe du ciel, je suis inspiré. Je n'ai même pas besoin d'y réfléchir à deux fois. Quant à ceux qui aujourd'hui, en ce moment même, s'occupent du monde, ce sont tous des incapables. Quels qu'ils soient. Des vendus. Des pourris. La preuve : le monde va de mal en pis et vice versa. Et les clandestins dites, si c'est pas une honte de voir çà ! Pourtant, moi, j'ai la solution. Ce que j'attends ? Pour la mettre en oeuvre ? Mais qu'on me le demande, tiens pardi. Qu'au moins on requière mon avis, c'est la moindre des choses, si l'on veut commencer à changer le monde. Car si on ne me demande pas mon avis, c'est bien la preuve que nul n'aspire réellement à changer le monde. Oh la la, des preuves, si j'en ai...!
Vous pensez bien que si je n'avais pas une idée précise afin que le monde allât mieux, je ne ramènerais pas ma fraise. Ni ma framboise.
Ainsi tenez, dès que le monde ira mieux, sous ma houlette éclairée, on commencera par interdire les riches. On peut même les interdire tout de suite. Si on permet les riches, alors c'est le retour à la barbarie des yachts. On interdira aussi tout ce qui nous contrarie : c'est cela, le monde à mon idée. Car tout le reste ne marche pas. Or mon idée n'a jamais été essayée : il va de soi qu'elle contrarierait trop de monde, tous ceux qui vous font de belles promesses et ne visent en réalité qu'à être califes à la place du calife, voilà c'est tout. C'est cousu de cordage à bateaux. Tandis que mon idée, elle, ne vise qu'un monde meilleur pour tous. Pour tous, sans exception : les sans-boulot, les endettés, les affamés, les assoiffés, les spoliés, les exploités, les laissés pour compte. J'ai déjà dit...? Ah oui pardon, c'est l'euphorie et l'ivresse du pouvoir! Quoi, j'ai pas raison ? Dites moi que çà n'existe pas, les sans-boulot, les endettés, les affamés, les assoiffés, les spoliés, les exploités, les laissés pour compte. Osez dire que çà n'existe pas ! ...Hein, j'en ai oublié ? Tiens, vous tombez bien : faites-moi donc une liste de tout ce qui ne va pas, dans ce monde. Je me fais fort de vous régler tout cela. Et comment !

 

L'humour est la respiration du sérieux, 

il signe notre supériorité sur la pesanteur du réel. (Trouvé dans le caniveau).

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